Fabriquer du bonheur, c’est possible ?

Depuis un an, j’exerce aussi mon métier de psychologue à Paris 17 au sein de La Fabrique à Bonheurs, centre de formation et de consultations fondé en 2012 par Audrey Akoun et Isabelle Pailleau. Un endroit coloré et inspirant, dont le nom fait sourire plus d’un, moi la première !
Lorsque l’opportunité de recevoir des patients à La Fabrique à Bonheurs s’est présentée à moi, la première chose que je me suis dit c’est que le nom de l’endroit était porteur de sens et que j’aimais beaucoup l’idée. Fabriquer du bonheur (ou plus exactement des bonheurs), aider l’autre à en fabriquer, le concept me plaisait bien.

J’ai eu d’emblée une représentation très imagée de la chose : une sorte d’usine à fabrication de petits pots de différentes couleurs et de différentes formes avec le mot « bonheur » marqué dessus et tout plein de gens aux commandes des machines pour fabriquer ce qui leur convient le mieux.

L’idée de fabriquer me parle particulièrement parce que les bonheurs, ça se fabrique. Dans le domaine de l’industrie, fabriquer c’est transformer des matières premières en produits finis. C’est faire une chose, à partir d’une ou de plusieurs matières données, par un travail. Mais fabriquer, c’est aussi produire naturellement. Lorsque j’entends le mot « fabrique » à côté de « bonheur », ça correspond bien à l’idée que je me fais du bonheur : quelque chose qui se fait, par un travail, et que nous avons tous la possibilité de créer, parce que nous avons en nous les matières premières pour ce faire.

Nous avons souvent l’impression que le bonheur ça nous tombe dessus, que ça nous arrive « comme ça », que c’est quelque chose qui nous parvient de l’extérieur. Nous sommes alors convaincus que lorsque nous aurons enfin cette promotion, lorsque nous rencontrerons l’âme sœur ou lorsque nous réussirons tel examen, nous serons définitivement heureux. Mais étonnement, lorsque la chose tant attendue arrive, la durée de notre « bonheur », ou plutôt de notre satisfaction, est assez courte : quelques jours, quelques semaines ou quelques mois au mieux ! Parce que, comme le dit Matthieu Ricard, « Le bonheur n’est pas quelque chose qui nous arrive mais une compétence que nous développons ».

J’ai toujours pensé que bien nommer les choses était capital. Alors l’idée d’offrir à un patient l’opportunité de «fabriquer du bonheur » est un joli cadeau. Mais… est-ce bien raisonnable ? Peut-on prétendre, nous les psys, que nous allons délivrer la potion magique du bonheur ?
Et quel est le rôle du psychothérapeute auprès de ses patients ?

Ni de faire à leur place, ni de leur donner des recettes miracles ni de plaquer sa vision des choses sur leurs problématiques. Le rôle du psychothérapeute selon moi est un peu celui d’un alchimiste : être pour son patient un révélateur de ressources et lui offrir la possibilité de croire au changement. C’est de permettre au patient d’adopter une autre perception des événements qui lui arrivent. Si un psychothérapeute arrive à ce que son patient sorte de son cabinet en se disant « je ne sais pas exactement comment et quand je vais y arriver mais j’envisage/je comprends/je vois qu’au bout de mon impasse, quelque chose est possible », alors c’est qu’il a fait son travail. La possibilité que le patient envisage cette autre perspective, c’est déjà une petite boîte de bonheur potentiel.

Puis petit à petit, au cours du cheminement de la thérapie, d’autres petites boîtes peuvent se fabriquer, un peu comme une chaîne. Et ce sont celles du patient, chacun avec ce qu’il est, son histoire, ses désirs, ses croyances. Car si nous ne pouvons rien contre les coups durs de la vie, nous sommes pleinement responsables des moments de bonheur que nous allons mettre en place. Et mettre en place des choses, jour après jour, chacun à son rythme, c’est un peu comme créer notre petite fabrique personnelle : on peut y mettre les ingrédients que l’on veut, actionner les machines que l’on souhaite, y aller de sa créativité et de son talent, inventer et prendre des initiatives, parce que notre bonheur nous appartient pleinement.

Vous avez aimé cet article ? Vous pouvez retrouver mes autres articles sur https://www.clairedahan.fr/confidences-de-ma-psy/
Pour plus d’infos sur La fabrique à bonheurs, rendez-vous sur https://www.lafabriqueabonheurs.com/

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1 Commentaire

  • Chloé Posted 14/12/2018 10 h 23 min

    Bonjour

    Le nom de la fabrique du bonheur est une bonne trouvaille.
    Vos mots « Ni de faire à leur place, ni de leur donner des recettes miracles ni de plaquer sa vision des choses sur leurs problématiques. » sont d’une justesse.
    En effet, de vrais alchimistes !

    Merci pour cet article

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