« Donner la vie, c’est aussi se redonner à soi. Mais encore faut-il savoir comment. »
Cet article clôt une série en trois volets sur la périnatalité, période qui va du désir d’enfant aux trois premières années de vie. Après avoir parlé de grossesse et de post-partum, nous abordons ici une étape essentielle : comment prendre soin de soi psychiquement dans ce grand bouleversement ?
Principe fondamental : l’acceptation précède le changement
Ce n’est pas en luttant contre ce qu’on ressent qu’on s’en libère, mais en l’accueillant.
En thérapie, on le sait bien : vouloir aller mieux commence souvent par accepter ce qu’on traverse, sans honte ni comparaison. Être mère ne veut pas dire tout maîtriser. Ça veut dire cheminer, apprendre à se connaître autrement… et surtout, s’autoriser à ne pas être parfaite.
MES OUTILS & MES RÉPONSES THÉRAPEUTIQUES
Répartir la charge mentale, ce n’est pas « aider », c’est co-parenter
Faire un enfant à deux, c’est aussi apprendre à le porter à deux.
À l’arrivée d’un bébé, tout change. Et trop souvent, la mère porte tout, tout de suite, tout le temps. Mais apprendre à déléguer, à lâcher sur le « faire parfaitement », c’est une force, pas une faiblesse.
Conseils pratiques :
- Définir ce qui est indispensable… et ce qui peut attendre.
- Accepter que l’autre parent fasse différemment (et peut-être moins bien, mais ce n’est pas grave).
- Laisser au père la place … de prendre sa place.
Et si on arrêtait de se comparer ?
La comparaison est une illusion : on se juge de l’intérieur avec l’extérieur des autres.
Aujourd’hui, les réseaux sociaux imposent une norme impossible : des mères rayonnantes, des bébés paisibles, des corps récupérés en trois semaines. Et forcément, on se sent moins bien, moins capable, moins légitime.
Des études montrent que l’usage excessif des réseaux sociaux diminue l’estime de soi. Et si certaines montrent désormais la réalité du post-partum, l’image dominante reste celle d’une mère performante et souriante, comme la fameuse apparition de Rachida Dati en tailleur et talons aiguilles trois jours après son accouchement… Quelle pression pour toutes les autres !
Le syndrome de l’imposteur version maternité
Vous connaissez le syndrome de l’imposteur qui consiste à penser que les autres font mieux et qu’on ne va pas tarder à être démasquées dans notre nullité ?
Beaucoup de jeunes mères ressentent qu’elles n’en font jamais assez, ou pas assez bien. Elles vivent cette impression d’être « à côté », « en retard », « pas à la hauteur ».
Et si, au fond, on arrêtait de croire qu’être une bonne mère, c’est tout réussir du premier coup ?
Les questions à se poser pour trouver son équilibre
Ai-je le droit d’être imparfaite ?
Oui. La mère parfaite n’existe pas. Winnicott parlait de la « mère suffisamment bonne » : celle qui fait de son mieux, avec ce qu’elle est. Et c’est déjà énorme.
Ai-je quelqu’un à qui parler, vraiment ?
Parler de ses doutes à un entourage bienveillant, non culpabilisant, non directif change tout. Une oreille sincère, c’est souvent le premier pas vers le soulagement.
Et si j’ai vécu un trauma ou une grande angoisse ?
Certaines femmes voient remonter des blessures anciennes : deuils, violences, accouchement traumatique. Dans ce cas, un accompagnement thérapeutique, même bref, peut faire une vraie différence. L’EMDR est particulièrement efficaces après un accouchement qui s’est mal passé.
Comment s’en sortir ? Quelles pistes pour aller mieux
- Accepter d’être « en chemin », pas en maîtrise.
- Dédramatiser ses erreurs : elles sont formatrices.
- Se détacher du mythe de la mère parfaite.
- Limiter l’exposition aux réseaux sociaux.
- S’entourer de personnes soutenantes, sans jugements ni dogmes.
- Consulter quand il le faut, sans attendre d’être à bout.
- Reprendre confiance : en soi, en son enfant, en la relation qui se construit.
Devenir mère, c’est aussi naître à soi-même
Et si le vrai modèle à suivre, c’était celui qu’on invente pour soi ?
Chaque femme mérite d’inventer son propre modèle de maternité, en accord avec son histoire, sa sensibilité, ses besoins. Être une mère suffisamment bien dans sa peau, c’est souvent suffisant pour qu’un enfant grandisse sereinement. Alors oui, devenir mère bouleverse. Mais cela peut aussi être une chance : celle de revisiter ses blessures, de faire la paix avec soi, et d’apprendre à aimer autrement.
Conclusion : Devenir mère, c’est aussi vivre des joies inédites
Et s’il y avait dans ce désordre un cœur battant de bonheur brut ?
Oui, devenir mère peut bousculer, ébranler, faire douter. Mais c’est aussi – et surtout – un lien d’une intensité bouleversante, une tendresse qui dépasse les mots, une capacité d’amour qu’on ne soupçonnait pas.
Il y a ces regards échangés au petit matin, ce corps à corps du peau-à-peau, ces fous rires imprévus, cette fierté de voir grandir un être que l’on accompagne. Il y a des jours d’épuisement, mais aussi des instants de grâce.
Être mère, ce n’est pas juste répondre à des besoins. C’est aimer, apprendre, transmettre, découvrir que le bonheur peut tenir dans une toute petite main.
Alors, à toutes les mères en chemin :
Vous êtes assez.
Vous faites de votre mieux.
Et vous avez le droit de savourer aussi ce que cette aventure a de plus lumineux.