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Trop d’écrans, est-ce-que c’est grave ?

Aujourd’hui, j’anime régulièrement des ateliers de prévention dans les écoles sur l’usage des écrans. Face à des adolescents souvent lucides mais débordés, je pose cette question toute simple :“Est-ce que c’est grave de trop regarder les écrans ?”.
Et très vite, on touche au cœur du sujet :
Non, les écrans ne sont pas « le mal ». Un smartphone, une tablette, une console… ce sont des outils. On peut y apprendre des choses, créer, s’informer, rire, garder le lien avec ses amis.
Mais le problème, c’est quand l’outil prend le pouvoir.
Quand on ne choisit plus vraiment, quand on allume « juste deux minutes » et qu’une heure plus tard on scrolle encore, quand on sent que le téléphone nous éloigne de ce qui nous fait du bien dans la vraie vie.
C’est ce constat — partagé par mes patients, mes collègues, mes élèves, les parents que j’accompagne et les ados que je rencontre — qui m’a poussée à animer des ateliers pour apprendre aux adolescents à comprendre et à prévenir l’addiction aux écrans.

Les écrans : quand l’usage devient surconsommation

Dans mes ateliers ou au cabinet, on parle très concrètement de ce que ça change dans une vie, un cerveau, un corps, un quotidien de passer du temps sur son portable :

  •  Le temps d’écran (trop d’heures cumulées) fatigue le corps : baisse de la vue, troubles du sommeil, maux de tête, sédentarité…
  • Le contenu regardé peut affecter l’estime de soi, surtout quand on passe des heures à se comparer à des images retouchées, à lire des commentaires haineux, ou à subir du cyberharcèlement.
  • Et puis il y a le plus insidieux : la perte de lien social dans la vraie vie. Moins d’interactions réelles, moins de sorties, moins de plaisir dans le monde « hors écran ». On finit par s’ennuyer dès qu’il ne se passe plus rien sur TikTok. Et parfois, on se sent triste,
    seul, sans vraiment savoir pourquoi.

Les écrans et la santé mentale : ce que disent les études

Ce que l’on observe en cabinet est désormais confirmé par de nombreuses recherches : le lien entre surconsommation des écrans et troubles psychiques est bien réel.
Et il ne s’agit pas seulement d’un “ressenti” : les effets cognitifs, émotionnels et relationnels sont mesurables.

Le smartphone devenu doudou moderne

Le téléphone portable est bien plus qu’un outil, il est devenu un objet de réassurance, qu’on touche machinalement des dizaines (voire des centaines) de fois par jour. Cette dépendance peut aller jusqu’à la nomophobie, la peur panique d’être séparé de son téléphone ou de ne pas pouvoir s’y connecter, un phénomène de plus en plus courant chez les jeunes (et les adultes…).

L’effet dopamine et récompense immédiate

Chaque like, chaque notification, chaque vidéo qui défile active le circuit de la récompense dans notre cerveau, via la dopamine. Ce système renforce le comportement… et c’est précisément ce mécanisme de renforcement intermittent, bien connu en psychologie, qui nous rend accro sans qu’on s’en aperçoive.

Les impacts sur l’attention, le sommeil, la mémoire

Les écrans, surtout s’ils sont utilisés en continu et dans un contexte multitâche, fragmentent l’attention et rendent plus difficile la concentration durable. Le soir, la lumière bleue retarde l’endormissement et perturbe la qualité du sommeil, ce qui impacte ensuite la mémoire, l’humeur et les apprentissages.

La fragilisation de l’identité et de l’estime de soi, surtout à l’adolescence

L’adolescence est une période-clé de construction identitaire… mais sur les réseaux, les jeunes sont en permanence confrontés à des images idéalisées, filtrées, ou retouchées. À force de se comparer aux autres, l’estime de soi peut s’effriter, surtout si l’on mesure sa
valeur au nombre de vues ou de likes. Et je le vois beaucoup au cabinet, surtout chez les jeunes filles.

Est-ce juste des impressions de Psy ?

Et non, les points problématiques que je viens d’évoquer ce ne sont pas que des “impressions de psy” :
De nombreuses études (JAMA Pediatrics, PubMed, Arxiv) montrent des liens clairs entre usage excessif des écrans et troubles de la concentration, perturbations du sommeil, symptômes dépressifs et anxiété sociale chez les jeunes.
Des experts comme Karila, Schüll ou Stora interrogent même la notion d’addiction comportementale : on ne parle pas de “drogue”, mais le cerveau, lui, réagit parfois comme s’il y en avait une.

À partir de quand c’est trop ?

Quand est-ce que ça devient problématique ? Je propose souvent ce petit auto-test (à faire sans jugement, juste pour observer) :

  • Est-ce que tu t’énerves ou t’angoisses quand tu dois poser ton téléphone ?
  • Est-ce que tu sacrifies ton sommeil pour rester sur les réseaux ?
  • Est-ce que tu perds la notion du temps quand tu regardes des vidéos ?
  • Est-ce que tu fais moins de choses que tu aimais faire avant ?

Si la réponse est oui à plusieurs questions, c’est peut-être le bon moment pour reprendre un peu le contrôle. Pas en supprimant les écrans, mais en choisissant comment, quand, et pourquoi tu les utilises.

Des idées concrètes pour rééquilibrer

Voici quelques astuces issues de la clinique, de la recherche et de mes ateliers :

  • Fixer un temps d’écran défini par jour ou par tranche horaire
  • Planifier du temps sans écran dehors (marcher, voir des amis, respirer)
  • Réintroduire du temps sans écran dedans (lire, créer, rêver, s’ennuyer un peu)
  • Supprimer les notifications inutiles
  • Passer son téléphone en noir et blanc pour le rendre moins attractif
  • Éviter l’écran pendant les repas, les devoirs et le coucher
  • Demander à ses parents un petit coup de pouce technique : contrôle parental, minuteur, blocage d’applis
  • Se demander honnêtement : « Est-ce que ce que je viens de voir m’a fait du bien ? »

Et si on reprenait les commandes ?

Dans mes ateliers, je répète souvent cette image :

Ton téléphone, c’est comme une trottinette électrique. C’est cool, rapide, fun. Mais c’est à toi de choisir la direction  !

Si c’est lui qui décide de ton emploi du temps, de ton humeur et de ton sommeil… c’est peut-être le moment de faire une pause, d’en parler, ou même de consulter. Parce qu’on peut apprendre à se reconnecter à soi-même, à son corps, à ses désirs.
Et ça, aucun algorithme ne pourra jamais le faire à ta place.

Envie d’en parler dans ton établissement scolaire ou auprès d’un groupe d’ados ?
Je propose des interventions pédagogiques et interactives, fondées sur les neurosciences, la thérapie, et des outils concrets pour réguler son usage numérique. Contactez-moi ici pour en savoir plus.