Les problèmes de sommeil représentent un des motifs de consultation les plus courants chez les enfants. Difficultés d’endormissement ou réveils nocturnes avec cauchemars, un bon nombre d’enfants ont des problèmes de sommeil, ce qui entraîne de la fatigue et peut perturber leur rythme, diminuer leur capacité de concentration en journée et générer des difficultés au sein de la famille. La peur de la nuit peut être d’une intensité importante chez l’enfant et provoquer de vrais malaises, accompagnés parfois de réactions psychosomatiques.
Je reçois régulièrement à mon cabinet des parents qui ont du mal à coucher leur enfant. L’enfant ne veut pas rester seul dans sa chambre, il a peur du noir, il veut une énième histoire ou un verre d’eau ou tout ce qui peut retarder le moment où les parents ferment la porte de la chambre pour que chacun aille dormir. Bien souvent, après quelques tentatives pour trouver une solution, l’enfant termine dans le lit de ses parents, ce qui n’est pas sans conséquences, que ce soit pour l’enfant ou pour le couple.
Mais alors que faire ? Le gronder et risquer d’accentuer les angoisses nocturnes ?
Le prendre dans la chambre des parents au risque de s’engouffrer dans un cercle infernal ? Et comment, en tant que parent, établir un dialogue pour comprendre ce qui pose problème à l’enfant et l’aider à trouver des solutions.
De quoi pourrait donc avoir besoin un enfant qui a des difficultés pour s’endormir et comment l’aider ?
Partager ses émotions :
La première chose à faire est d’établir un dialogue avec votre enfant pour essayer de comprendre ce qui le préoccupe la nuit. Car pour désamorcer ses peurs, votre enfant a besoin d’identifier et de verbaliser ses émotions. Lui donner la parole va lui permettre de sentir qu’il n’est pas tout seul à les gérer. Bien souvent, les enfants parlent par métaphores : un enfant qui a peur du loup ne s’apaisera pas si vous essayez de lui démontrer qu’il n’y a pas de loup en ville. Mais si vous prenez au sérieux cette peur des loups, et si vous lui demandez de quoi d’autre a-t-il peur, il sera plus confiant pour vous parler de ses autres peurs. Bien souvent, on découvre alors des soucis à l’école, ou avec un camarade, des inquiétudes concernant la santé de ses parents ou la peur que la famille soit séparée. Cette inquiétude, qui prend la forme de « j’ai peur du loup » symbolise en fait l’insécurité ou la peur de l’abandon.
Sécurité :
Pour s’endormir, il faut se sentir suffisamment en sécurité pour lâcher prise et ne plus contrôler. On insiste énormément sur l’importance de devenir autonome chez l’enfant, mais pour être autonome et lâcher la main de ses parents, il faut d’abord avoir expérimenté la sécurité affective : le petit commence à marcher s’il sait que ses parents sont là, juste derrière, en cas de besoin. La sécurité affective précède l’autonomie : c’est parce qu’un enfant sait que ses parents sont là pour lui, qu’il est important pour eux et qu’il peut compter sur eux, qu’il va pouvoir se lancer pour explorer le monde. Cette sécurité affective représente un socle, une base solide sur laquelle l’enfant peut se reposer. La nuit représente pour l’enfant une séparation avec ses parents et l’expérience du sommeil se vit seul. Face à cette séparation, il peut y avoir des inquiétudes : « mes parents seront-ils là à mon réveil ? Vont-ils rester à la maison pendant que je dors ? Que vont-ils faire pendant ce temps-là ? » Il est important de rappeler à votre enfant que vous êtes là dans la maison et que vous ne partirez pas lorsqu’ils dormiront. J’entends parfois des parents me dire que lorsqu’ils sortent le soir, ils couchent leurs enfants avant que la baby-sitter arrive, sans leur dire qu’ils s’en vont, puisque de toutes les façons, l’enfant dort et qu’il n’en saura rien. Or c’est précisément ça qui inquiète l’enfant : que ses parents s’en aillent pendant son sommeil. Mais à tout âge, l’enfant a le droit de savoir ce qui va se passer pendant son sommeil. Et au cas où il se réveille, il vaut mieux qu’il n’ait pas la désagréable surprise de constater que ceux sur qui il compte ne sont pas là, ce qui peut largement être traumatisant.
Personnellement, si mon conjoint doit s’absenter au milieu de la nuit pour son travail même quelques heures, je préfère largement le savoir à l’avance, pas vous ?
Repères :
Un enfant n’a pas la même notion du temps qu’un adulte. La durée d’une nuit est très abstraite dans la tête d’un enfant. Cela paraît évident mais pour autant, les parents ne donnent pas assez de repères à l’enfant sur ce que représente la nuit. Il existe des tas de supports expliquant aux enfants, selon leur âge et leur niveau de compréhension, combien d’heures dure une nuit, à quoi correspond environ cette durée, qu’est-ce qui se passe dans l’organisme durant la nuit. La peur du sommeil est souvent une peur du néant, du vide et symboliquement, de la mort. Or il se passe des choses alors que nos yeux sont fermés. L’organisme continue à vivre, les cellules se régénèrent, le sang continue à circuler, le cœur continue à battre et le cerveau mémorise les informations emmagasinées durant la journée. Expliquer cela aux enfants leur permet une représentation différente de cette pause que représente la nuit.
Rituels :
De la même façon que le soir, avant de dormir, nous baissons la lumière de la pièce, nous prenons un livre ou écoutons de la musique, l’enfant a besoin de se constituer des repères qui veulent dire « bientôt, je vais aller dormir ». Et le meilleur moyen de constituer des repères est de construire ceux de l’enfant avec lui. Car lui seul sait de quoi il a besoin le soir : une histoire, une chanson, un temps de jeu calme dans la chambre, des câlins. Ce qu’il estime lui être nécessaire pour intégrer que d’ici peu, il va s’endormir.
Enfin, lorsque tout ceci ne suffit plus, il peut être nécessaire de consulter un spécialiste : un pédiatre ou un psychologue qui prendront le temps de discuter avec l’enfant et d’aider les parents à revoir certaines habitudes du soir. Car il faut toujours prendre au sérieux les angoisses nocturnes : si parfois ces angoisses représentent une étape classique du développement de l’enfant, il peut arriver aussi que ces angoisses-là soient une porte d’entrée vers des problématiques plus importantes. Quoi qu’il en soit, votre enfant doit pouvoir sentir qu’il n’est pas seul avec ça.
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