Il y a des petites phrases comme ça qu’on entend depuis notre tendre enfance et qui résonnent de longues années dans notre tête. Quand j’étais petite, mon père me répétait souvent « fais un effort » lorsqu’il m’aidait à faire mes devoirs. Pour ma mère, c’était plutôt « fais plaisir » quand je préférais rester dans ma chambre plutôt qu’écouter tante Germaine venue prendre le thé. Et à l’école, comme j’étais tout le temps en retard, on m’assenait souvent « dépêche-toi ». Plus tard, à partir de l’adolescence, j’ai beaucoup entendu « sois parfaite » et tout cela m’a beaucoup pesé.
Car ces petites phrases en apparence anodines induisent un bon nombre de nos comportements lorsque nous devenons adultes. Ce sont des injonctions parentales classiques, qui ont pour but de nous pousser à avancer, mais qui peuvent devenir ce qu’on appelle des messages contraignants. C’est-à-dire des messages qui nous obligent à adopter certains comportements qui sont inadaptés et que nous reproduisons sans cesse parce que nous sommes persuadés que c’est ce qu’il convient de faire.
L’Analyse transactionnelle nous apprend que ces messages entendus dans notre enfance sont intériorisés et forgent notre façon d’être en relation aux autres. Cette théorie, élaborée dans les années 50 par E. Berne, psychiatre américain, est une des théories les plus appliquées dans les métiers de la relation d’aide. Selon E. Berne, nous passons notre temps à être en interaction avec l’autre et nous communiquons sans cesse, de manière verbale ou non-verbale pour demander, refuser ou accepter quelque chose. Toute entrée en contact avec l’autre est une sorte de transaction, qui repose sur l’idée que ce que j’exprime à l’extérieur de moi trouve une origine à l’intérieur de moi.
L’Analyse transactionnelle a identifié 5 messages contraignants, qu’on appelle aussi « drivers », qui veut dire en anglais pilote ou conducteur. Pourquoi ce terme de driver ? Car les messages entendus dans l’enfance vont véritablement guider et conduire notre manière de penser et d’agir. Au point de reproduire certains comportements même s’ils sont néfastes.
Et voici ces 5 drivers :
2/ Sois parfait :
c’est un message fondé sur la croyance que lorsqu’on fait une chose, il faut la faire parfaitement. Message composé de phrases du type « tu aurais pu mieux faire », ou « c’est bien, mais… ». Cela donne souvent des personnes très minutieuses, perfectionnistes, parfois dans le tout contrôle, qui peuvent produire un excellent travail mais qui mettent la barre trop haut. Elles ont l’art du détail et ont du mal à gérer les priorités car l’hyper-contrôle prend du temps. A l’extrême, cela peut rendre les personnes procrastinatrices car si rien n’est jamais assez bien, autant ne rien faire…
2/ Fais plaisir :
il faut être gentil, attentif et dévoué pour être bien avec les autres et mériter leur estime et leur compagnie. Ce sont des phrases telles que « il n’y a pas que toi, pense aux autres », ou encore « ne sois pas égoïste ». Ces messages vont souvent rendre les gens serviables, toujours prêts à aider les autres, parfois même envahissants dans leur façon de vouloir les aider. Mais ce sont souvent des personnes qui ont un trop grand besoin de plaire, qui ont peur de décevoir l’autre et à l’extrême, des personnes en grande dépendance affective.
3/ Fais un effort :
l’idée est d’être persévérant, déterminé et de ne jamais reculer devant les difficultés. Ce sont des phrases du type « donne-toi du mal » ou encore « on n’a rien sans rien ». Cela donne des personnes qui s’impliquent énormément dans ce qu’elles font, qui déploient beaucoup d’énergie dans leurs projets et qui aiment les difficultés, avec l’idée que réussir implique de les surmonter. Elles aiment se dépasser mais à terme, sont très exigeantes envers elles-mêmes, dévalorisent souvent leurs résultats ou compliquent les choses.
4/ Sois fort :
il faut être courageux, ne pas pleurer, ne pas faillir car la vie est un combat à gagner ! Ce sont souvent des phrases entendues du type « dans la vie, tu dois te battre » ou « on ne pleure pas ». Et cela donne des personnes qui cachent souvent leurs émotions, qui se barricadent derrière une façade de protection. Elles estiment qu’elles doivent se débrouiller toutes seules et ne demandent jamais d’aide. D’où parfois un isolement relationnel et émotionnel.
5/ Dépêche-toi :
dans un monde qui va de plus en plus vite, se dépêcher est une vraie valeur car prendre son temps c’est perdre son temps ! Ce sont des phrases telles que « tu es lent » ou « à ce rythme-là, on n’est pas rendu… ». Et nous avons là des personnes efficaces, qui prennent rapidement des décisions et qui savent fonctionner dans l’urgence. Mais ce sont des personnes qui s’ennuient vite et se mettent la pression en prenant plus de choses sur leur dos qu’elles n’en sont capables. Elles sont autonomes à l’extrême et ont du mal à travailler en équipe ou à être en groupe. C’est également le profil type des burn-out…
Ces portraits sont certes caricaturés mais peut-être vous êtes-vous retrouvés dans l’un d’eux ? Et si on laissait tous ces messages contraignants derrière nous ? Et si on comprenait que certaines de nos difficultés relationnelles récurrentes sont dues aux exigences que nous avons envers nous-mêmes et par conséquent envers les autres ?
Il ne s’agit pas de nier nos tendances mais de les identifier pour en apprendre à en tirer le positif. Le tout est de savoir avec quel message ou driver nous fonctionnons et comment l’utiliser au mieux.
Et vous, quels sont vos drivers ?
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